Larbi Chouikha
Après la mise au pas de la Ligue tunisienne des droits de l’Homme, la reprise en main de l’Association des magistrats, voici venu le tour du Syndicat des Journalistes Tunisiens, qui était déjà dans le collimateur du pouvoir, et qui se trouve complètement dépossédé de sa direction légitime. Depuis mardi après-midi, un cordon de police encercle le siège, en bloque l’accès à ses membres, et on apprend que le président légitime, Néji Bghouri, a été agressé et humilié publiquement par les forces présentes. En fait, ce coup de force a été opéré avant même que les tribunaux aient prononcé un jugement ordonnant l’évacuation immédiate des locaux par le bureau légitime du Syndicat. Cette « reconquête légale » du siège par la direction imposée à la tête du SJT à la faveur du coup de force du 15 août dernier, vise en fait à empêcher la tenue du congrès extraordinaire du syndicat légitime prévu pour le 12 septembre prochain, qui devait se tenir dans ces lieux.
. Comme jadis pour le Syndicat des Magistrats et la LTDH, le SJT se trouve, donc, en butte à toutes sortes de tracasseries et de harcèlements, depuis son congrès constitutif du 13 janvier 2008 qui avait débouché sur l’élection d’une direction composée à majorité d’indépendants. Comme pour la LTDH et le Syndicat des Magistrats, opportunistes, manipulateurs et zélateurs de tous poils ont conjugué leurs efforts et ont excellé dans l’art des intrigues et des basses manœuvres de déstabilisation. Comme pour le Syndicat des Magistrats, la LTDH… les procédés destinés à mettre au pas et à domestiquer les ONG en vue de les muer en OVG (Organisation Véritablement Gouvernementales) peuvent être directs et sans scrupules ; mais ils peuvent aussi trouver un appui ou un habillage dans les structures administratives, publiques, censées - normalement - demeurer neutres. Comme pour la LTDH, le déclencheur de cette campagne fut la publication par le SJT, l’an dernier, à l’occasion de l’anniversaire de la journée mondiale de la liberté de la presse, de son premier rapport annuel sur l’état déplorable de la liberté de la presse en Tunisie et, comme pour la LTDH, une vaste campagne de dénigrement, de calomnies, orchestrée par les médias, s’en prend aux dirigeants du syndicat, qui se voient affublés des mêmes qualificatifs d’agitateurs, d’opposants notoires, d’agents à la solde de l’étranger…. Comme à la LTDH, le pouvoir a, aussi, mis en œuvre tout un dispositif pour étrangler financièrement le Syndicat. Le fonds d’entraide et de solidarité entre les journalistes, constitué en structure autonome du SJT, agit comme un contre-SJT par l’octroi aux journalistes d’aides matérielles (ordinateurs portables, prêts logement, etc.) et par le « soutien à la candidature du Président Ben Ali à la présidentielle de 2009 », défiant ainsi la position de neutralité adoptée par la direction légitime du Syndicat pour les prochaines échéances. Encore une fois, donc, le pouvoir s’acharne à annihiler toute tentation d’autonomie, d’où qu’elle vienne, et les quelques ONG qui résistent encore peuvent tout autant se trouver brusquement condamnées à la précarité totale, qui prélude généralement à leur disparition.
Décidément, les procédés sont toujours les mêmes, la rhétorique est immuable et l’imagination ne semble pas être traversée par un quelconque vent de changement ou de renouvellement. Décidément, la logique de la force, du diktat de la voix unique, de l’outrecuidance d’être infaillible, demeure invariable. Décidément, nous sommes devant un nouvel indice que la campagne électorale 2009 ne s’annonce pas sous les meilleurs auspices.
Larbi Chouikha
Attariq Aljadid – N :145- 12 Septembre 2009
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